[ Accueil ] [ La Serie TV ] [ Les Films ] [ Goodies ] [ La Belle Epoque ] [ Depositions ] [ Forum ] [ Liens ] [ Contact ]
 


















Jérôme Cornuau sur le tournage du film
© photo : Bruno Calvo - Les Films Manuel Munz

:: Interview::
Jérôme CORNUAU
réalisateur du film "Les Brigades du Tigre"

- propos recueillis par Le Mobilard

A la veille de la parution en DVD du film "Les Brigades du Tigre" produit en 2005 et sorti le 12 Avril dernier sur nos écrans ; nous nous devions de nous entretenir avec son réalisateur. Jérôme Cornuau retrace ici pour nous le parcours qu'il a suivi sur ce projet et nous dévoile des informations sur la suite programmée des aventures de nos trois brigadiers motorisés...

Qu’est-ce qui vous a amené sur ce projet de film ?

Jérôme Cornuau (réalisateur) : J'ai été contacté par mon frère, François Cornuau, qui détenait les droits d'adaptation. Le séquencier était écrit. Je l'ai  lu et ensuite rencontré les deux scénaristes Fabien Nury et Xavier Dorison. Il n'était pas très difficile de se motiver pour dire oui. Ce type de films dans le contexte de la production Française est assez rare: film de genre, d'époque, qui met en relief des personnages contrastés et ambigus. Nous étions tous d'accord sur la direction du film que je voulais mettre en scène. Peu après, mon frère étant jeune producteur, fit appel à Manuel Munz pour produire le film. Ce dernier apporta donc sa maîtrise et sa passion.


© photo : Bruno Calvo - Les Films Manuel Munz

Parlez-nous un peu du processus d’écriture du scénario. D’où vous est venue cette  histoire très complexe dans laquelle Bonnot n’est que le détonateur d’un vaste complot autour des emprunts Russes ?... Quelles y sont les parties historiques véritables ?

La structure existait peu ou prou quand je suis arrivé. Elle était sans doute un peu plus rocambolesque, autour de la couronne du Tzar, avec moults courses poursuites, mais les grandes lignes étaient tracées. Notamment la décision de démarrer par Bonnot pour rebondir sur les emprunts russes. Pour ce qui concerne la réalité historique il y a beaucoup d'éléments véritables autour de Bonnot, de son arrestation (j'ai vu les actualités de l'époque), mais également autour des Brigades du Tigres, de la police scientifique, de la rivalité entre le directeur de la Sûreté et du préfet de police de Paris. L'opéra d'Ivan le Terrible de Rimsy Korsakov avait bien été joué à Paris, (en 1909), les emprunts Russes... En gros, tout le contexte politique et social. Ensuite nous avons, à la façon d'un Dumas, entrelacé fiction et vérité pour apporter plus de romanesque, notamment à travers le personnage de la Princesse...


Clovis Cornillac (Valentin) - Jérôme Cornuau - Edouard Baer (Pujol)
© photo : Bruno Calvo - Les Films Manuel Munz

Vous étiez un fan de la série TV ?

Non, pas réellement; il m'en restait un souvenir relativement peu précis. Je me suis plus décidé sur la lecture du scénario. Par la suite, pendant la préparation j'ai regardé quelques épisodes de la série, mais la mise en scène et la direction d'acteur étaient très éloignées de mes intentions de mise en scène. J'ai donc décidé de m'appuyer sur le souvenir qu'en avait les gens: les mêmes points revenaient de façon récurrente : la musique de Claude Bolling, les trois personnages principaux, le côté folklorique de la Belle Epoque.

Qui avez-vous consulté pour retranscrire les éléments de la série? Et avez-vous un instant songé à l’éventuelle participation des comédiens originaux pour apparaître dans le film, par exemple dans des seconds rôles? (Jean-Claude Bouillon, Pierre Maguelon, Jean-Paul Tribout)

Nous avons rencontré Claude Desailly, scénariste de la série, pour lui demander son avis sur le scénario, le casting, mais il n'a pas voulu collaborer au film. Il ne se reconnaissait pas dans notre volonté d'un ton globalement  plus réaliste... Je crois qu'il n'approuve pas cette adaptation. C'est dommage.
Pour ce qui concerne les comédiens, nous étions entre deux rives;  le désir d'honorer les trois comédiens de la série, avec le risque d'un clin d’œil qui fasse sortir du film. J'ai finalement opté pour essayer de les intégrer dans le match de boxe avec les mobilards. Nous avons pris contact sans doute trop tard. Les emplois du temps respectifs  ne coïncidaient pas avec le plan de travail.


© photo : Bruno Calvo - Les Films Manuel Munz

Justement, certaines libertés semblent avoir été prises dans cette adaptation au dépend d’une vision plus historique et académique, mais aussi au niveau des personnages originaux (Pujol devient ici plus sombre, un quasi psychopathe). Pourquoi ces choix ?

Je ne suis pas certain que cela soit "au dépend". Je crois que l'académisme de la série ne correspond plus aux exigences de mise en scène actuelle au cinéma. Le rythme n'est plus le même, ni le filmage, ni la direction d'acteur, ni la lecture des spectateurs... Sur les personnages également, je ne pense pas que ce soit "au dépend" ; nous voulions des personnages réalistes qui éprouvent de façon réaliste le quotidien de cette époque. Des personnages plus proches de l'univers de James Ellroy...  Pujol est effectivement plus sombre mais de là à le traiter de psychopathe... Pour Pujol nous voulions corser le personnage en lui attribuant une morale proche des truands. Son histoire d'amour avec Léa...

On sent que les acteurs se sont investis pleinement dans leur rôle et même au-delà. Un Edouard Baer grandiose à contre-emploi, Olivier Gourmet et son accent du Sud-ouest plus que véridique, la révélation du charismatique Alexandre Medvedev, la confirmation d’un Thierry Frémont en méchant très convaincant, pour ne citer qu’eux… Vous y êtes pour beaucoup dans les directions qu’ils ont adoptées ?

Je crois oui. Il est toujours difficile de cerner ce qui vient de l'acteur et ce qui vient du metteur en scène. C'est un travail collégial, basé sur des discussions, des sensations... Je propose au comédien l'esquisse du personnage, sa façon d'être, de s'habiller... et ensuite le comédien s'approprie ce personnage pour le mûrir et créer quelque chose de plus. Ensuite, sur le plateau, c'est la même chose; nous travaillons ensemble par touches. Il est certain qu'en demandant à ces merveilleux comédiens de jouer dans le film, j'avais l'idée de les montrer sous un jour inattendu.


Thierry Frémont (Piotr) & Jacques Gamblin (Bonnot)
© photo : Bruno Calvo - Les Films Manuel Munz

Un des éléments phares de la série était la musique du générique. Pourquoi ne pas avoir garder les paroles de la chanson de Henri Djian ?

Dans la série, le chanson était utilisée dans le générique de fin. Là encore, nous avons longuement hésité. Nous hésitions sur le chanteur qui devait interpréter la chanson. Très franchement, je ne sais pas pourquoi, au bout du compte, nous avons abandonné l'idée, probablement un manque de temps sur les finitions.

Un mot sur le succès en salle ? Le public n’était-il pas au rendez-vous ? Mauvaise date de sortie aux côtés de blockbusters américains ?

Je n'irai pas jusqu'à dire que le public n'était pas en salle. 750 000 personnes ce n'est pas rien. C'est moins que les chiffres espérés, mais ce n'est pas rien. Quand au pourquoi ? Je ne sais pas. Il est vrai que la date de sortie était risquée ; très proche de la fin du film, à peine plus d'un mois pour le présenter à la presse... Concernant la concurrence, ce n'est pas tant les films américains que les nombreuses comédies françaises : La doublure, Jean-Philippe, OSS 117, Camping... Un mois très chargé en films populaires de qualité ; le public a tranché pour les comédies.


Stefano Accorsi (Bianchi) & Olivier Gourmet (Terrasson)
© photo : Bruno Calvo - Les Films Manuel Munz

Est-ce que la suite annoncée de l’épisode 2 verra bien le jour, ou est-ce que la rumeur d’abandon s’avère vraie ?

Le séquencier de l'épisode 2 est effectivement écrit par Fabien Nury et Xavier Dorison. Mais il est pour le moment arrêté. Je ne connais pas les intentions du producteur sur cette suite.

Ce second scénario était prévu pour se dérouler durant la Grande Guerre. Pouvez-vous nous en dévoiler quelques détails ? Qu’y font les personnages, que deviennent-ils ?

1917. La France est au bord de la défaite. Tandis que l'on crève dans les tranchées, une autre guerre fait rage à l'arrière : celle contre les traîtres et les saboteurs. Face à ces ennemis de l'ombre, les Brigades mènent le combat et doivent neutraliser un réseau d'espions allemands. très vite, ils découvrent que l'ennemi n'est pas forcément dans le camp que l'on imagine...


Edouard Baer (Pujol)
© photo : Bruno Calvo - Les Films Manuel Munz

Nous sommes à la veille de la sortie du DVD, que nous réserve cette première édition collector ? Et quelle en est sa date de sortie ?

Le film sort début Décembre en vente. Il y a 20 minutes de scènes coupées, un bêtisier, des sujets courts sur la fabrication du film, un commentaire audio de Fabien Nury et moi-même.

Que nous apporte la version longue rallongée de 20min? Plus de précisions sur l’implication du personnage de Jean Jaurès, par exemple ?

Pas tant sur Jaurès que sur la rivalité entre la préfecture et les brigades. Et également sur les emprunts russes.

Et cette fin alternative ?

Cette fin montre la condamnation à mort de Constance ; mais elle n'a pas été montée.


© photo : Bruno Calvo - Les Films Manuel Munz

Pour finir, une anecdote de tournage ou un souvenir particulier ?

Un souvenir globalement merveilleux. En anecdote, l'explosion lors du siège de Bonnot devait n'être qu'une diversion, dans le scénario, (comme dans la réalité historique), le siège se poursuivait ensuite. Mais au vu de l'ampleur de l'explosion pendant le tournage (toutes les fenêtres du village ont sauté, et la voiture de collection détruite par le souffle) j'ai préféré terminer la scène ainsi.

 

LA GENESE DE LA SERIE TV

par Claude DESAILLY
Scénariste & Dialoguiste des Brigades du Tigre :
  • "Je lisais alors, par hasard, les mémoires d'un vieux policier, le commissaire Belin, celui-là même qui arrêta Landru. Il y parlait d'un temps mythique, le début de ce siècle. Un temps où les voitures automobiles ressemblaient encore à des voitures à cheval sans cheval, un temps où les gendarmes, eux, allaient vraiment à cheval à la poursuite des voleurs, un temps où les messieurs portaient de belles moustaches et les dames d'extravagants chapeaux. Pourtant déjà pointait le monde d'aujourdh'ui sous les défroques du XIXème siècle. Naissaient alors toutes les découvertes qui allaient bouleverser notre temps. Elles avaient encore à l'époque tout le piquant de la jeunesse. Quel prodigieux réservoir pour l'imaginaire que cette charnière de l'hisoitre!.. Et Clémenceau, lui, le "Tigre", suivait le mouvement - ou le précédait !- en créant une nouvelle police à l'image de son époque, qui pourrait enfin se mesurer à armes égales avec un banditisme déjà converti aux techniques modernes. Eternelle rivalité de l'obus et de la cuirasse!
    Et je me laissais aller à rêver à ce temps, si lointain... et si proche!
    Comme il serait amusant, pensais-je, de se servir d'un tel fil conducteur en des récits filmés où seraient inversées les données temporelles... C'est-à-dire, en partant d'acquis contemporains devenus par l'habitude de simples banalités, de leur rendre leur éclat d'origine en les résistituant soudainement dans le contexte de leur naissance où ils émerveillaient alors le monde par leur audace et leur originalité... Les automobiles... Les aéroplanes... La T.S.F ... Le vote des femmes... Le cinématographe...
    C'est à ce moment que le téléphone sonna... Miracle presqu'incroyable : la Télévision française (enocre O.R.T.F) me demandait une idée de série policière, bien française et un peu originale.
    Cette idée, bien sûr, je l'avais. D'emblée, elle fut acceptée par l'O.R.T.F... Tout allait bien, donc!.. Et bien pas du tout. Cela aurait été, en effet, mal connaître les mystères qui régissent cette estimable administration! Le projet disparut au fond d'un tiroir et y resta trois ans!
    ... Et puis un jour, un beau jour de 1973, sans que l'on sût non plus pourquoi, il ressortit, tel un Diable de sa boîte. Et tout, cette fois, alla très vite, l'écriture, la production, la réalisation...
    Et enfin cette heureuse rencontre avec la musique de Claude Bolling!
    Les miracles n'ont lieu qu'une fois, dit-on, pour Les Brigades du Tigre, ils eurent lieu six fois, lors des six séries que nous fimes... Une septième était en cours, lorsque, de nouveau, et malgré l'engoûement du public, les monstres des ténèbres administratives l'étouffèrent!.. Espérons qu'un jour... Mais ceci est une autre histoire... "

 
[ Accueil ]
Copyright © 2006 ::Le Mobilard:: www.lesbrigadesdutigre.fr.st